En Bolivie, des paroles de sagesses seront-elles entendues ?

7 Déc 2020

En Bolivie, des paroles de sagesses seront-elles entendues ?

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Récemment, le nouveau vice-président Bolivien, David Choquehuanca, a prononcé un discours d’un autre genre à l’assemblée nationale. Il a parlé de la culture de la vie, de l’interrelations entre tous les être, de la Pachamama, et du cosmos. Il a parlé d’harmonie avec la Terre-Mère. Il a également rappelé à l’auditoire que le mode de vie et la compréhension du monde des peuples autochtones sont vilipendés par le pouvoir colonial afin de permettre leur extermination. Pourtant, comme l’a affirmé David Choquehuanca, ces peuples n’ont jamais perdu leur chemin.

Il a utilisé dans son discours, des mots indigènes tel que « Ayllu » qui est un système d’organisation de tous les êtres, de tout ce qui existe, où tout devrait circuler en harmonie sur notre planète. Ce mélange des genres savant et intelligent dévoile une perspective différente sur notre monde étroit et violent.

Les références autochtones au sacré et à la vie ont articulé son discours. De plus, ses propos rappelaient l’importance de la lutte contre « toutes formes d’assujettissement et contre les modes de pensées coloniales et patriarcales … »

Il a insisté sur la nature du pouvoir qui déforment les esprits des politiciens. Comment est-ce arrivé ?

Bien trop d’Occidentaux aiment à croire qu’ils contrôlent toutes choses. Cette croyance crée un modèle bloquant qui impose aux autres populations ce qui servira leurs intérêts.

Ils ont idolâtré leur civilisation, imposant cette relation de pouvoir aux autres, au point qu’ils ne puissent plus voir qu’elle était devenue source de disharmonie.

Le choc de la civilisation a un autre côté !

Au cours des quatre dernières années, les personnes « sans pitié » en charge du gouvernement des États-Unis, avec les extravagances de leur commandant en chef, ont piétiné toute l’éthique humaine, les droits et l’intelligence de la vie. Mais ils sont le pur produit de cette civilisation disharmonieuse. En Arizona, les Indiens d’Amérique ou se sont mobilisés en grand nombre pour arrêter l’habituelle hégémonie conservatrice sur l’État. Mais leurs votes n’ont même pas été comptés comme des votes Amérindiens, comme l’a fait remarquer Jordi Archambault, la citoyenne de la tribu des Sioux de Standing Rock. Ils ont été enregistrés sous la catégorie comme « autre chose » sur l’infographie de CNN. Les Amérindiens sont rendus invisibles, tout comme l’histoire de l’effusion de sang qui a construit les États-Unis, a fait remarquer Archambault.

Invisible à nouveau, la lutte pour le respect des Shinnecock face à l’État de New York. Leurs terres et leur mode de vie, y compris leurs pêcheries, sont toujours menacés par l’État.

C’est pour cela, que la nation Shinnecock a créé Sovereignty Camp 2020 pour rappeler à l’État et à ses habitants qu’ils étaient une vraie nation.

Les femmes amérindiennes des États-Unis ont mené la lutte contre les plans néfastes des « Blancs » visant à les exploiter elles et leur terre, qui est la Terre Mère, et ainsi à éliminer complètement leur mode de vie. Les femmes et les hommes autochtones ont été à l’avant-garde des combats contre le changement climatique et contre les systèmes écologiques. « L’eau, c’est la vie », criaient-ils. Elles et ils se sont organisé.es en protecteurs de l’eau, pour la protection de la vie. Elles et ils ont coordonné des cérémonies, ont combattu et gagné aussi en cour de justice.

Aujourd’hui, on observe la résurgence de la stratégie de contamination des nations amérindiennes par la variole. Pour rappel, les colons blancs avaient donné des couvertures contaminées par la variole aux Amérindiens au XVIIIème siècle ce qui avait décimé la population autochtone. Seulement cette fois, la contamination a pris une forme différente ; il s’agit de la Covid 19. Celle-ci avait peu affecté les réserves au moment de la première vague et elle fait des ravages à l’heure actuelle. Le pouvoir tribal a essayé d’isoler les réserves pour protéger ses populations particulièrement vulnérables dont la santé a été précarisée par les conditions de vie imposées à ces nations. La nation Navajo alerte sur l’affaiblissement de l’état de santé de leurs ainés en raison de l’extraction honteuse de l’uranium, laissant des eaux contaminées pour les communautés amérindiennes. Le taux de contamination par la Covid 19 est le plus élevé du pays voire du monde dans de nombreuses réserves, tuant en premier les ancien.nes qui sont les passeurs de savoir et de la connaissance de la langue en particulier. Avec la pandémie, les nations amérindiennes ont peur de perdre des repères importants pour maintenir leur langue.

La terre amérindienne est à saisir. La stratégie est toujours la même, isoler et créer une série de justifications pour rendre la vie plus précaire et plus difficile pour ces communautés. La puissance coloniale menace sempiternellement les populations autochtones.

La société politique néolibéral axée sur le profit, n’a pas admis la nature de l’équilibre dont parle David Choquehuanca dans son discours. L’harmonie est une disharmonie ; la vie est rythmée par une série de crises. Le féminin est retiré de la sphère publique et laissé à l’exploitation et à la violence dans le processus, tout comme la Terre. Il y a une partie de la politique qui ne concerne que les images masculinisées de la technologie, du pouvoir financier et du progrès en tant que sauveurs d’âmes, pour laisser entrer une certaine laideur. C’est cette laideur que le vice-président Bolivien a identifié et attaqué, utilisant l’héritage et le pouvoir culturel de son peuple pour appeler à une transformation profonde du pouvoir dans son pays. Ses mots devraient être une leçon pour nous tous.

(Photo Credit: Sandro Cenni / Medium) (Image Credit: Jordan Singh / Twitter)